Pourquoi je suis devenue Gestalt-thérapeute ?
8 juillet 2022

Témoignage d’Isabelle Soulat, Gestalt-thérapeute et Directrice de l’ILFG

Je viens d’un monde éloigné de la Gestalt, de la psychologie et du soin. Issue d’une famille où les « grandes écoles » et la sciences sont des vertus reconnues voir des passages obligés pour trouver une place et être reconnue. Ainsi, j’ai d’abord fait des études d’ingénieur en agronomie et je me suis orientée vers la protection de l’environnement. 20 années dans la fonction publique ont eu raison de ma motivation et de mon envie de poursuivre dans cette voie, non pas que la question de l’écologie ne soit pas au centre de mes préoccupations, mais parce que le cadre proposé par la fonction publique était trop enfermant.

École d’agronomie de Montpellier

De la quête de sens au métier de gestalt-thérapeute

Le premier moteur de ma recherche a été la quête de sens. Le sentiment quotidien de ma finitude me poussait à m’engager dans une voie qui ait du sens notamment dans le fait de participer à un monde un peu meilleur et qu’il réponde aussi à un besoin de liberté personnelle que le cadre de la fonction publique ne pouvait pas m’offrir. Mon rôle de mère m’a aussi amené à buter sur mes limites relationnelles et à m’interroger profondément sur la relation.

La rencontre avec la gestalt-thérapie, d’abord pour des raisons personnelles, a été un bouleversement car elle a ouvert un champ des possibles incroyable par rapport à mes visions finalement étriquées, ou en tout cas limitées, issues de mon éducation. Elle a ouvert à une liberté intérieure, un plaisir dans la rencontre, des possibilités créatives inconnues jusqu’alors.

En parallèle, la rencontre de maitres spirituels, du yoga a ouvert en moi les questions spirituelles, et non pas religieuses, au sens de qu’est-ce qu’être pleinement un humain, comment se développer et croitre dans les différentes dimensions de l’être humain ?

l'étoile de ginger pour illustrer les différentes dimensions de l'etre humain en gestalt-thérapie
Étoile de Serge Ginger d’après « La gestalt, une thérapie du contact » – les différentes dimensions de l’être humain

Je dirais que mon projet de départ, quand je me suis engagée dans la formation de gestalt-thérapeute à l’ILFG, tournait autour :

  • du fait de me sentir utile et donc ainsi de donner du sens à ma vie alors que je sentais de manière prégnante la fragilité, l’impermanence de ma vie et mon impuissance à agir sur le monde,
  • de côtoyer et participer à alléger la souffrance car j’ai depuis toujours une relation assez intime avec la solitude, la tristesse et celle des autres ne me faisait pas vraiment peur, voire même me faisait sentir le témoin et à l’écoute de la souffrance de l’autre m’apporte une sensation d’intimité et de proximité qui me donne le sentiment d’exister,
  • travailler dans un cadre à la fois de sécurité mais aussi de liberté et de créativité, ce qui me semblait être l’exact inverse de ce que m’offrait la fonction publique.

Aujourd’hui, alors que j’exerce le métier de gestalt-thérapeute depuis 8 ans environs, qu’est-ce qu’il continue de m’apporter ?

  • d’abord il me permet de vivre des relations d’intimité. Quoi de plus intime que d’entendre les histoires de vie, les vicissitudes, les souffrances, les traumatismes des personnes qui viennent me rencontrer. Ainsi je peux sentir l’autre vibrer devant et avec moi, sentir sa chaleur, ses larmes, ses rires, traverser tous les thèmes de l’expérience humaines dans une proximité qui rend la relation vivante et précieuse. Et en même temps c’est un lieu où il y a de la sécurité parce qu’il y a un cadre, le cadre de la rencontre thérapeutique, en respect de nos codes de déontologie;
groupe de personnes en mouvement comme en gestalt-thérapie
« Les danses à deux temps » de l’école de danse contemporaine de Montréal

la rencontre thérapeutique est aussi une occasion d’authenticité.

  • Au sein du cabinet le client se dévoile peu à peu et les masques névrotiques sont mis à jour justement grâce à la relation thérapeutique et au thérapeute qui sert de miroir au client. Être ce miroir qui aide le client à reconnaitre avec sa tête mais aussi avec son cœur et son corps ses fonctionnements vient me solliciter fortement dans une exigence de responsabilité et de transparence. C’est déjà cela être utile pour moi, ce n’est pas changer l’autre mais être vraiment présente. Je suis là en face de toi avec toute mon expérience, mes connaissances mais aussi mes limites et mon propre caractère. Ce que je suis, avec mes qualités et mes limites peut ainsi servir dans le sens d’être mis au service.

mon cabinet de thérapeute est aussi un lieu d’apprentissage et de liberté.

  • Pour qui ? Pour moi bien sûr mais pour l’autre aussi quand il peut s’en saisir. J’apprends ainsi chaque jour les mille et une facettes de l’humain et je m’efforce de les comprendre, au sens de les prendre avec moi, de leur ouvrir les bras et le cœur. J’apprends aussi à contacter mes limites qui sont chaque jour actualisées par la rencontre et qui demandent à être mises au travail. J’apprends aussi à travers mes lectures et les partages avec mes pairs pour mettre du sens et des concepts afin de mieux éclairer et donner du sens, de la profondeur, des perspectives à tous ces mouvements de vie qui se déroulent devant et avec moi. J’apprends encore à exercer ma liberté pour me sentir vivante et inviter l’autre à en faire autant comme un parent qui voudrait montrer le chemin et le faire sentir à son enfant.
  • un espace de liberté incroyable. Protégée par le cadre thérapeutique, ce que j’avais pressentis avant de m’engager, se confirme pour moi. L’espace thérapeutique est un lieu de liberté ou d’apprentissage de la liberté. J’ai la sensation d’offrir à l’autre un lieu pour être, penser, agir en toute liberté au sein du cadre. Je dois dire que dans le monde dans lequel nous vivons cela me semble extrêmement précieux. Cette invitation à la liberté, par l’exercice de la mienne propre, m’apporte de la joie autant qu’un sentiment de responsabilité.

N’idéalisons pas la relation thérapeutique

Mais n’idéalisons rien ! Être gestalt-thérapeute ce sont aussi des moments d’ennui, de frustration, d’impuissance. Certes ils ont toujours un sens et ils disent quelque chose du processus de notre rencontre, mais la relation thérapeutique ce n’est pas que du plaisir, c’est varié, comme la vie !

Cet article n’est qu’une photo à un instant et en aucun cas une vérité, ni pour moi, ni pour vous, mais j’espère qu’il peut contribuer à enrichir votre réflexion. Si vous souhaitez échanger avec moi sur votre projet ou si vous aussi vous voulez partager et témoigner sur votre posture de gestalt-thérapeute n’hésitez pas sollicitez-moi !

Isabelle Soulat

Directrice de l’ILFG